MAJ décembre 2019
Plusieurs labels existent en apiculture. Comment choisir? Y'a t il une grande différence entre du miel Biologique ou conventionnel? Quels sont les cahiers des charges? Pour y voir plus clair, je vais tenter de détailler ici quelques points essentiels pour comprendre les différents labels et leurs conséquences.
Soyons clair, un miel 100% biologique en France est très rare, voire inexistant. Si vous recherchez le label biologique pour être certain de l'absence de molécules chimiques dans votre miel, ne rêvez pas : tant qu'il y aura des pesticides sur tout le territoire, ce sera rare voir impossible. Selon une enquête de 60 millions de consommateurs, après analyse sur des miels français, on y retrouve "91 molécules indésirables (56 pesticides et 35 antibiotiques)'', avec une moyenne de 5 produits différents par pots. Les miels bios sont ceux dans lesquels on en retrouve le moins, mais ils en comportent quand même pour une partie d'entre eux (seuls 2 miels sur les 76 analysés en tout ne contiennent pas de molécules recherchées, et ce sont des miels bios). Ces mesures restent bien en dessous des limites officielles, et le miel est un aliment peu pollué par rapport aux autres produits (légumes, fruits...)
Mais un label ne prend pas seulement en compte les emplacements de ruches dans son cahier des charges. Il y a donc tout de même une réelle différence entre les miels conventionnels et les miels biologiques, et même entre les miels issus de différents labels.
Car dans la conduite d'un cheptel, il y a bien entendu les emplacements, mais également les traitements utilisés par l'apiculteur. Les antibiotiques sont par exemple interdits, bien qu'on en retrouve parfois en conventionnel. Les traitements contre le varroa sont limités en agriculture biologique, l'Amitraz, pesticide utilisé par un grand nombre d'apiculteurs, y est remplacé par des traitements alternatifs tels que l'acide formique ou oxalique, qui ont l'avantage de ne pas laisser de résidus ni dans le miel ni dans les cires aux doses utilisées.
Pour le reste, un détail par label est nécessaire, car leur cahier des charges peut varier. Je les liste ci dessous par ordre d'exigence, du moins disant au plus strict.
C'est le label officiel. Il a été créé en 1985, mais en 2009, l’état l'harmonise avec les autres labels européens. En fait d'harmonisation, il est tout simplement allégé, et devient un label moins exigeant, avec un cahier des charges plus léger qu'auparavant.
Voir le cahier des charges repris par Ecocert ici
En 2010, après que l'Etat eut allégé le label officiel, des agriculteurs en bio ont créés leur propre label, en utilisant l'ancienne charte AB, et en l'améliorant un peu.
Voici ce qu'il ajoute en terme de contraintes, en plus du label AB.
Voir le cahier des charges complet, page 25.
C'est historiquement un des premiers labels d'agriculture biologique, créé en 1972, avec une revue créée en 1964. Ce label est très clairement orienté vers une agriculture à taille humaine, respectueuse de l’environnement et de l'homme. Il est beaucoup plus strict que la réglementation officielle.
Voir le cahier des charges complet ici
Créé en 1928, c'est le plus ancien label en agriculture. Il impose un cahier des charges très strict et en lien très fort avec la nature, avec la bio dynamie.
Voir le cahier des charges complet ici (page 26 pour l'apiculture)
Mise en garde : La biodynamie ne repose sur aucune étude scientifique. Développée par Steiner en 1924, ne donne aucun mécanisme explicatif, et son fondateur refuse la méthode expérimentale, en appelant uniquement à la foi de ceux qui voudront bien le croire. Certains pratiquants ont des liens avec des mouvements "anthroposophiques", parfois proches de pratiques sectaires. Soyez donc vigilants!
Il existe assez peu d'études fiables sur les bienfaits de l'agriculture biologique, et les polémiques entre experts sont légion. Malgré tout, j'ai trouvé quelques infos "indiscutables" issues d'études sérieuses
Une étude environnementale de 2005 donne les conclusions suivantes, après 22 ans de comparaison entre agriculture biologique et conventionnelle (PIMENTEL D et al.Vol. 55 No. 7 BioScience 573, juillet 2005) :
Une autre étude réalisée sur 3 ans démontre les bienfait de l'agriculture biologique sur la biodiversité, en comparaison au système conventionnel (Benefits of organic farming to biodiversity vary among taxa. R. J. Fuller1 et al. Biol. Lett.2005 Published online) :
En faisant un tour d'horizon de plusieurs études, on trouve quelques données précises sur le sujet, mais impossible d'obtenir une sorte de moyenne afin de comparer globalement les produits conventionnels et biologiques (Afssa 2003 « Evaluation des risques et bénéfices nutritionnels et sanitaires des aliments issusde l’agriculture biologique » ; Tsiplakou E et al. J dairy resp., 2010 ; Raigon MD et al. J agric food chem., 2010 ; Oliveira M et al. Food microbiol., 2010) :
Une étude de 2008, sur 23 enfants de 3 à 11 ans a observé les résidus de pesticides dans les urines des sujets durant 1 an (Dietary intake and its contribution to longitudinal organophosphorus pesticide exposure inurban/suburban children. Lu.C et al. Environ. Health. Perspect. 2008) :
Il apparaît très clairement que durant les journées en régime biologique (dénommés ci dessus "Organic diet days") les pesticides dans les urines sont très réduits voire absents. La nocivité à long terme de tels produits est tout à fait inquiétante, particulièrement si l'on prend en compte les effets de synergie des divers pesticides consommés, même à petites doses.
L'agriculture biologique a donc un aspect de durabilité environnementale très forte. Son impact est très positif sur la qualité des eaux, la fertilité des sols et la biodiversité, avec des risques de pollution par les nitrates faibles ou nuls.
L'agriculture biologique peut répondre également à la problèmatique de l'emploi, car elle est plus exigeante en main d’oeuvre. De plus, une étude du FNAB datant de 2002 conclue que les agriculteurs en Bio sont bien insérés et ont une bonne qualité de vie. Elle favorise également l’installation d’agriculteurs avec une faible capacité d’investissement mais possédant un bon niveau technique. Enfin, ce marché est en pleine croissance.