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Mathieu Angot - Formateur en apiculture - Conférencier

Le CERMN : travail de recherche sur Varroa

Juin 2015

Marie-Pierre Halm Du CERMN (Centre d'études et de Recherche sur le Médicament de Normandie) a présenté aux apiculteurs normands en janvier dernier ses travaux sur la recherche d'un traitement efficace contre le Varroa. Le but serait d'apporter un traitement plus efficace aux apiculteurs, sans qu'il soit nocif pour l'abeille. A noter que c'est une première dans la recherche publique, alors que le problème de varroa est connu depuis le début des années 1980.

Pourquoi étudier Varroa au CERMN ?

Ces recherches ont pour origine le bilan désastreux fait par Marie-Pierre Halm sur la problématique du Varroa : peu de traitements disponibles en France, l’acarien s'adaptant aux molécules, et le développement de nouveaux traitements qui n'est pas rentable pour les firmes phytosanitaires. Il semblait donc urgent qu'un établissement public s'engage dans cette recherche, qui ne viendra sans doute pas du privé.

La première démarche du CERMN a été de lister les acaricides disponibles à l'étude. Avec une préférence pour les molécules utilisées dans la recherche sur Alzheimer et le cancer, maladies déjà étudiées au sein du CERMN.

Agir sur Varroa, pas sur l'abeille

L'angle préconisé dans cette recherche est d'agir sur le système nerveux du Varroa. Pour se faire, il faut que la molécule utilisée inhibe la production d'une protéine. Le problème rencontré avec de nombreux traitements est que la toxicité touche le Varroa mais également les abeilles. Les produits disponibles sur le marché jouent essentiellement sur un dosage censé être plus nocif sur l'acarien car plus petit, mais sans jouer sur la nature des molécules. La grande innovation du CERMN est qu'il y aura ici étude génétique sur l'abeille et le Varroa afin de définir le risque pour l'un et l'autre. Le but est de trouver un acaricide à la fois très toxique pour le Varroa, mais peu toxique pour l'abeille, en jouant sur la génétique des deux.

Après une étude théorique de milliers de molécules (technique informatique appelée screening), une piste se dessine avec une des molécules testées. Le puceron vert du pêcheur ayant développé une résistance à cette molécule, et son génome étant proche de celui de l'abeille, on suppose une résistance potentielle de l'abeille à cette molécule. Il s'agit maintenant de vérifier son effet, chose complexe car le génome du Varroa n'est pas disponible en qualité suffisante. Il faudra donc travailler soit sur le génome de la tique (proche du Varroa), soit séquencer le génome du Varroa de manière plus fiable, mais les fonds manquent.

Après tests en laboratoire, et comparatif avec d'autres molécules, les premiers résultats sont concluant :

 

Toxicité sur Varroa

Toxicité sur abeille

Coumaoxon (proche Coumaphos)

100 %

95 %

Formétanate

87 %

97 %

Molécule testée

68 %

21 %

Ces résultats sont donc encourageants, car la différence de toxicité est bien plus élevée que sur les molécules témoins. En jouant sur les dosages, on pourrait obtenir des résultats intéressants.

Une étude à suivre

Le CERMN étudie d'autres molécules, mais le génome peu fiable du varroa est un frein à leurs recherches. Le manque de Varroas vivants pose également un problème majeur malgré la participation de plusieurs apiculteurs.

Aujourd'hui des demandes de financement sont en cours, mais sans certitude. Clémence Riva, étudiante en thèse a obtenu le financement de sa thèse sur trois ans pour continuer ce travail et arriver à une liste de substances intéressantes. Reste à trouver l'argent pour financer les recherches.

MAJ mai 2019

Depuis l'écriture de l'article, ces recherches ont fait l'objet d'un thèse de Mme Clémence Riva : Application de la démarche de drug-design pour la conception de nouveaux médicaments vétérinaires contre le parasite Varroa destructor que vous pouvez consulter ici librement.