L’apiculture « naturelle », qui se donne pour objectif de rapprocher au maximum la pratique de l’apiculteur de l’état naturel de la colonie d’abeilles, existe depuis bien longtemps.
Mais avec les questionnements sur la place de l’homme et son impact sur un environnement pas au mieux de sa forme, elle prend de l’ampleur depuis quelques années. Des revues apicoles reconnues comme « Abeilles et cie » du CARI étudient désormais la question, et l’apiculture naturelle a même son magasine dédié : « Abeilles en Liberté », depuis 2019.
Au delà de l’image d’Épinal qu’elle peut évoquer pour certains, ce type d’apiculture est en fait très concrète, et se traduit par un rapport à la colonie très différent de celui qui est véhiculé habituellement. On prend en compte l’autonomie de la colonie d’abeilles, elle est encore un outil de production dans certains cas, mais ce n’est plus sa fonction principale. La production de miel devient secondaire, l’autonomie et la liberté de la colonie devient la priorité. Cela se traduit par quelques éléments concrets, qui seront appliqués de différentes manières selon les apiculteurs.
Les visites de la ruche perturbent forcément les colonies. La température baisse, les phéromones sont brassées par le courant d’air produit, la propolis est cassée, parfois des abeilles sont écrasées… Bref, une visite, si courte soit-elle, est perturbante. Posons nous donc la question suivante avant d’aller au rucher : « cette visite est-elle nécessaire? »
Il est aussi possible de limiter la gêne occasionnée, en utilisant des couvres cadres souples, pour ne découvrir qu’une partie de la colonie.
La cire gaufrée utilisée par de nombreux apiculteurs a plusieurs défauts pour l’apiculteur « naturel » :
Dix fois plus épaisse, elle limite la cohésion de la colonie, en empêchant le passage des vibrations, des phéromones, qui sont des moyens de communication utilisés dans la colonie.
Elle contraint la construction des cellules, en obligeant à produire des ouvrières. Dans la nature, on décompte 15% de cellules de mâles, ce qui est rarement le cas dans une ruche conventionnelle.
On peut introduire sans le vouloir des produits non désirés via la cire gaufrée : voir les scandales à répétition dans la filière cire…
Elle allège le travail des cirières, ce qui peut créer un déséquilibre dans la colonie. En effet, lorsqu’une caste se retrouve sans activité, c’est une cause d’essaimage possible.
Vous verrez de nombreux apiculteurs gratter à chaque visite la propolis, afin de faciliter leur intervention.
Or, dans la nature la propolis a un rôle décisif : elle assainit la ruche, et prévient éventuellement les maladies. Laisser la propolis partout ou les abeilles décident d’en mettre est une évidence en apiculture naturelle.
En apiculture conventionnelle, on échange souvent les cadres entre les colonies, afin d’avoir un cheptel homogène. Cela masque les défauts de nos reines, et permet à des colonies faibles de se reproduire et donc de transmettre ces faiblesses aux autres. La nature, impitoyable, ne permet qu’aux souches les plus adaptées de survivre.
Si une colonie est trop faible, et qu’il ne veut pas la laisser mourir, l’apiculteur peut intervenir pour changer la reine par exemple.
En conclusion, c’est à chacun de piocher dans ces pratiques celles qui lui paraissent légitimes, et applicables en fonction du contexte. Bien entendu, la liste est loin d’être exhaustive, et on pourrait y ajouter bien d’autres choses : éviter la transhumance, ne par avoir trop de colonies dans un rucher, limiter ou éliminer les traitements varroa… La liste est longue!